Que devons-nous faire ? La question est aussi ancienne que la philosophie. En France, elle est souvent abordée à travers la pensée antique, mettant l’accent sur la meilleure façon de vivre et d’agir. Elle est également abordée dans le sillage des penseurs allemands du 19e siècle, valorisant l’intention ou encore le sens de nos actions.
La philosophie utilitariste ou conséquentialiste, elle, se fonde sur une intuition plus pragmatique : la valeur morale d’une action dépend surtout de ses conséquences. Plus elle apporte de bonheur sans léser personne, meilleure elle est. En forçant à peine le trait : peu importe l’intention préalable ou la justesse avec laquelle on exécute une action, seuls comptent ses effets concrets sur le monde et sur les autres.
La question devient dès lors : comment évaluer les conséquences de nos actes, de sorte qu’on puisse décider ce que nous avons intérêt à faire et à ne pas faire ? Comment faire advenir « le plus grand bonheur possible », pour reprendre le titre de l’ouvrage de Katarzyna de Lazari-Radek et Peter Singer. Ces deux éminents spécialistes de l’utilitarisme présentent l’histoire et les débats animant ce courant de pensée, depuis son émergence – dans l’Antiquité mais surtout au 18e siècle – jusqu’à aujourd’hui.
Écrite de manière remarquablement claire et pédagogique, cette introduction est à mettre entre toutes les mains. Elle a également le mérite de s’attarder avec honnêteté sur les objections et les difficultés rencontrées par l’utilitarisme, bien que l’auteur et l’autrice en soient des partisans revendiqués. En traduisant cet ouvrage paru en 2017 en Grande-Bretagne, les éditions Eliott poursuivent un travail salutaire de diffusion et de démocratisation des philosophies de tradition anglo-saxonne en France.
À lire : Le Plus Grand Bonheur possible. Une introduction à l’utilitarisme, Katarzyna de Lazari-Radek et Peter Singer, Eliott, 2022, 192 p., 17,50 €. Cette critique est parue dans Sciences Humaines (n° 357 – avril 2023).
Fabien Trécourt • Journaliste 