Les libéraux et les laïcs redoutent une dérive autocratique du pouvoir issu des Frères musulmans.
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Des milliers d’Egyptiens ont réinvesti la place Tahrir mardi 27 novembre pour protester contre la décision du président Morsi d’élargir ses pouvoirs © Chris Harris / The Times / SIPA
« Nous ne voulons pas d’un nouveau pharaon », scandent les manifestants place Tahrir, au Caire. Des milliers d’Égyptiens ont convergé, mardi 27 novembre, pour protester contre la décision du président Mohamed Morsi d’élargir ses pouvoirs. C’est la plus forte mobilisation contre le président issu des Frères musulmans, depuis son élection en juin. Des affrontements ont eu lieu pendant la nuit ; mercredi matin encore, la police tirait des gaz lacrymogènes sur les manifestants. Le président a, pour sa part, refusé de retirer les décrets qui ont déclenché la colère populaire.
Mohamed Morsi a élargi ses pouvoirs, explique-t-il pour engager rapidement des réformes en attendant l’adoption d’une nouvelle Constitution. La semaine dernière, il s’est autorisé à prendre toutes les mesures nécessaires pour « protéger la révolution » et instaurer une démocratie, plaçant ses décisions à l’abri de tout recours en justice… Pour ses détracteurs, le risque est de voir un dictateur se substituer à Hosni Moubarak, l’ancien raïs déchu par le soulèvement du 25 janvier. Des heurts entre partisans et adversaires du chef de l’État se multiplient dans tout le pays.
Des centaines de personnes sont blessées, un membre des Frères musulmans est même décédé. À l’issue d’une réunion de crise avec le Conseil suprême de la magistrature, Mohamed Morsi accepte finalement de réduire la portée du décret aux seuls domaines qui relève de la souveraineté de la présidence. Mais ce compromis ne satisfait pas tous les libéraux, les laïcs ou les organisations de gauche, car il laisse une grande place à l’interprétation.
La communauté internationale est elle-même dans l’expectative. Si le département d’État américain minimise les risques de dérive autocratique, la porte-parole concède que la situation n’est « pas claire ». Le Fonds monétaire international a averti qu’un « changement majeur » dans la politique économique pourrait remettre en cause un accord sur un plan d’aide à 4,8 milliards de dollars. Un argument de poids, à l’heure où l’Égypte a besoin d’aide pour relancer son économie… L’opposition égyptienne espère néanmoins, des Etats-Unis et de l’Europe, des condamnations plus fermes.