Dans un discours à l’occasion de l’assemblée plénière du Conseil pontifical Cor Unum, le pape Benoît XVI a dénoncé les études sur le genre, mais les conséquences qu’il lui prête sont inexactes.
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Le pape s’est à nouveau attaqué aux théories du genre, un courant de pensée associé à la légalisation du mariage gay. Dans un discours adressé aux participants de l’assemblée plénière du Conseil pontifical Cor Unum — consacrée à « La Charité, nouvelle éthique et anthropologie chrétienne » —, il appelé les chrétiens à dire « oui » au mariage fondé sur la réciprocité du masculin et du féminin, et « non » à « des philosophies comme celles du genre ». Pour l’Église catholique, cette théorie affirme que l’identité sexuelle n’est pas déterminée par la nature, mais imposée par la société et par la culture.
Benoît XVI dénonce « une anthropologie sur fond athée », qui présuppose « que l’homme soit réduit à des fonctions autonomes, l’esprit au cerveau, l’histoire humaine à un destin d’autoréalisation ». Abstraction faite de Dieu, ajoute-t-il, ce qui est techniquement possible devient moralement licite. Le piège le plus à craindre de ce courant de pensée serait l’absolutisation de l’homme : il voudrait être « dégagé de tout lien et de toute constitution naturelle ». L’assistance médicale à la procréation et, plus généralement, la transgression de normes biologiques considérées comme un don de Dieu sont en ligne de mire.
Le paradoxe, c’est que les études sur le genre ne correspondent pas tout à fait ce tableau. Si elles se fondent parfois sur la distinction du sexe biologique et du genre, et opposent à toute forme de finalisme une certaine liberté individuelle, elles n’ont pas forcément les conséquences escomptées. S’agissant du mariage gay, par exemple, nombre de ces philosophes le soutiennent du bout des lèvres. Judith Butler notamment, auteur de Trouble dans le genre, se méfie du caractère « conservateur » et « normatif » de toute forme de mariage, y compris entre les couples de même sexe donc. Elle juge l’institution potentiellement discriminatoire.
Même constat pour l’assistance médicale à la procréation. « Je ne crois pas que la médecine de la reproduction soit intrinsèquement une forme d’émancipation, déclare-t-elle à Philosophie magazine. La sélection du sexe de l’embryon peut être une forme de discrimination. » Autre réticence : « La question ici, est de savoir si les technologies de reproduction ne risquent pas d’amener l’enfant à éprouver un sentiment de privation — qui peut aussi s’éprouver dans l’adoption. » Si ces remarques sont davantage des interrogations que des affirmations, elles révèlent, loin de l’hubris techniciste, une préoccupation morale plus nuancée que ne semble le supposer l’Église.