Les dernières élections législatives ont été marquées par la percée du parti Yesh Atid, connu notamment pour son opposition aux religieux.
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Des supporters du parti centriste Yesh Atid manifestent leur joie après l’annonce des résultats, le 23 janvier, au QG du parti © LEVINE / SIPA
« Surprise laïque » : c’est la conclusion d’une majorité de commentateurs à l’issue des élections législatives israéliennes. Le parti « Yesh Atid » (« Il y a un avenir ») réalise une percée inattendue ; il s’impose comme la deuxième force politique du Parlement, alors que les sondages lui accordaient la quatrième place. Créé en janvier 2012 ce mouvement se montre très critique vis-à-vis des partis religieux, son fondateur, l’ancien journaliste Yair Lapid, n’hésitant pas à les qualifier de « lobbyistes » et de « nababs ».
Les ultra-orthodoxes sont dans son collimateur : ils ne travaillent pas et perçoivent des allocations, ce qui leur permet de consacrer leur temps aux études religieuses. « Alors que les hausses d’impôts commencent à peser lourd sur les épaules de la classe moyenne, analyse France 24, le ressentiment de la majorité laïque s’accroît ». De plus, ils n’effectuent pas de service militaire, contrairement au reste de la population. Le leader de « Yesh Atid » a mis en garde contre de telles dissensions tout au long de sa campagne.
Selon Élisabeth Marteu, chargée de cours à Science Po Paris, cet attachement aux enjeux économiques et sociaux, « avec une attention particulière pour la classe moyenne laïque et le slogan du “partage du fardeau” », explique le succès de Yair Lapid. Ce résultat montre plus généralement que « la force centriste en Israël est installée ». Les partis qui s’en réclament ont bénéficié d’une campagne axée sur des questions domestiques, notamment celle du clivage entre laïcs et religieux.
L’autre leçon de ce scrutin, poursuit-elle, c’est une radicalisation de la droite. Le parti « Habayit Hayeoudi » (« La Maison des juifs »), formation issue de l’ancien Parti national religieux, triple son nombre de sièges. « M. Bennet [son fondateur] revient à des scores dignes du parti religieux dans les années 60. » Cette droitisation se retrouve dans le mouvement du Premier ministre sortant, Benyamin Netanyahou, avec la montée en force des nationalistes religieux. « Le processus d’entrisme de cette vieille garde pro-colon au sein du Likoud a porté ses fruits. », estime-t-elle.
Mais pour Frédéric Encel, auteur d’un Atlas Géopolitique d’Israël (éd. Autrement, 2012), il n’y a pas à proprement parler de percée de la droite religieuse : on peut, selon lui, observer une remontée à court terme, dans la mesure où elle sort tout juste d’une crise interne. Mais sur le long terme, elle a « presque toujours » obtenu le même nombre de sièges qu’aujourd’hui. Si on prend du recul, estime-t-il, les dernières législatives traduisent au contraire « un coup d’arrêt de la droitisation de l’opinion au profit d’une “centrisation” ». Pour autant, la percée du parti « Yesh Atid » ne serait que le nouveau visage d’un phénomène récurrent dans l’histoire du pays. « Il y a régulièrement en Israël des poussées de fièvre laïque », résume-t-il.