Le pape François a critiqué de façon particulièrement franche le comportement des évêques italiens, qu’il juge en décalage avec le message qu’il souhaite voir porté par l’Église.
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Le pape s’adresse aux évêques italiens lors de la 65e Assemblée générale, le 26 mai © Gregorio Borgia/AP/SIPA
C’est une « bomba », une bombe qu’a lâchée le pape François, et qui a soufflé l’épiscopat italien à la surprise générale. Jeudi, à l’occasion du discours de clôture de la 65e Assemblée générale de l’un des plus puissants corps des évêques au monde — près de 300 membres pour 221 diocèses, soit deux fois plus qu’en France —, le chef de l’Église a dénoncé « la paresse », « l’esprit de carrière », voire le goût de « l’argent » de certains cardinaux. Ce discours a été prononcé « sans tenir compte des corrections suggérées par la Secrétairerie d’État, qui avait pourtant cherché à amortir le coup », précise Le Figaro.
« Le manque de vigilance rend tiède le pasteur, a notamment dénoncé le souverain pontife, le rend distrait, oublieux et même indifférent (…) Il risque d’être séduit par la perspective d’une carrière, la tentation de l’argent, et les compromis avec l’esprit du monde », et de se transformer ainsi en « un fonctionnaire, un agent public plus préoccupé de lui-même, de l’organisation et des structures que du vrai bien du peuple de Dieu. » Le danger, poursuit-il, est de renier par des actes le message de l’Église « même si formellement on parle en son nom ». Ce texte semble d’autant plus critique et violent que l’exercice est d’ordinaire mesuré et contrôlé, pour ne pas ternir l’image du clergé.
Ces accusations trouvent un écho singulier en Italie, où les prélats sont régulièrement accusés d’opulence et de carriérisme. C’est un thème récurrent du cinéma néo-réaliste des années 50 à 70 notamment, où le comique de situation repose sur le décalage entre le discours et le comportement. Dans une scénette du film Les Monstres par exemple (Dino Risi, 1963), l’acteur Vittorio Gassman interprète un prêtre obsédé par son apparence… tout en vantant un détachement total vis-à-vis de la superficialité et des valeurs matérielles ! Ce sketch s’appelle « le testament de saint François » car, comme le discours du pape, il oppose la pratique des clercs au message du fondateur des franciscains.
La liberté des évêques est « assiégée de mille conditionnements internes et externes, qui souvent suscitent déception, frustration, voire incrédulité », a résumé le pape. Il a en conséquence appelé de ses vœux une Église « libérée de l’idolâtrie du présent », dont les pasteurs soient « détachés de la torpeur de la paresse, de l’esprit mesquin, du défaitisme ». « Votre voix doit être reconnaissable de ceux qui ont embrassé la foi mais aussi de ceux qui ne sont pas encore dans ce troupeau », a-t-il encore ajouté, suggérant que ces dérives dévalorisent aussi l’image du catholicisme dans le reste de l’opinion publique. Alors, conclut-il, « nous découvrirons la joie d’une Église servante, humble et fraternelle ».