En Egypte, voile intégral sur les écrans

À partir du 20 juillet, premier jour du Ramadan, une nouvelle chaîne de télévision en Égypte sera exclusivement animée par des femmes portant le niqab.

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C’est l’un des plus vieux journaux du monde arabe, Al-Ahram, fondé en 1875, qui l’annonce sur son site internet : à compter du 20 juillet, une nouvelle chaîne de télévision égyptienne est animée par des femmes portant le niqab — le voile islamique couvrant l’intégralité du corps et du visage, à l’exception des yeux. Nommée « Mariya », en référence à une esclave égyptienne copte offerte au prophète Mahomet, elle diffusera six heures de programmes par jour via le canal d’Islamic Umma Channel.

Sur le plateau, en coulisses et même au téléphone, les hommes n’y ont pas droit de cité, assure Safaa Refai, qui prend la direction de la chaine. Même les invitées qui ne portent pas le niqab habituellement devront s’y faire le temps d’une émission, ou accepter que leurs visages soient floutés à l’antenne. « Nous nous adresserons directement aux Musulmanes, poursuit la dirigeante, pour leur enseigner la Sunna », la pratique de l’islam. Un documentaire sur l’infidélité dans un couple marié est d’ores et déjà programmé. Safaa Refai préfère garder pour elle le nom du fondateur.

Sur un plan strictement professionnel, indépendamment de considérations morales ou politiques, ce choix éditorial est sujet à caution. Selon Mona Salman, égyptienne et présentatrice vedette de la chaîne satellitaire Al-Jazeera, le concept serait plus approprié en radio. À la télévision, certes, « le présentateur n’apparaît pas dans certains programmes, comme les documentaires ». Néanmoins, « une fois qu’il est devant la caméra, les expressions faciales deviennent très importantes (…) Elles sont essentielles pour créer un lien avec le public, y compris par le regard. » Il n’est pas dit que l’équipe de « Mariya » puisse susciter l’engouement d’un large public.

Dans l’histoire de la télévision, la beauté des présentatrices a toujours fait les choux gras de médias et, aujourd’hui, de forums internet. En 1977 déjà, Coluche y faisait allusion dans le sketch du clochard analphabète : « elle est belle, on dirait une speakerine ». D’une certaine manière, la chaine « Mariya » fait un pari osé. « Le physique ne devrait pas être un critère d’embauche pour les présentatrices », note la journaliste Laura Raim dans Le Figaro. De fait, le problème se pose dans de nombreuses chaines, françaises par exemple, où sortir des canons usuels peut freiner une carrière. Pour autant, voiler le corps, miroir de l’âme selon Oscar Wilde, pourrait être tout autant handicapant dans ce média — par excellence celui de l’image et de la personnalisation.

 

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