Archives de Tag: biologie

Pourquoi craque-t-on pour les chatons mignons ?

Cette chronique est parue dans Sciences Humaines (n° 355 – Février 2023). À lire pour aller plus loin : Trop mignon ! Mythologies du cute, Vincent Lavoie (Alpha, 2022), et Le Pouce du panda, Stephen Jay Gould (1979)

Succès monstre de l’été dernier, Stray est un jeu vidéo permettant d’incarner un chat roux aux grands yeux verts. On déambule à pas feutrés dans une ville futuriste, en bondissant avec grâce de toits en gouttières. On se fait caresser le dos par un robot en ronronnant, on saute sur les cuisses d’un employé de bureau, on fait tomber un objet du bout de la patte pour attirer son attention… Cerise sur le souriceau : le joueur peut appuyer sur un bouton pour faire « miaou » à l’écran. Mais pourquoi craque-t-on ? Dans son essai sur le « mignon », l’historien de l’art Vincent Lavoie cherche l’origine de cet attachement.

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« Apprendre, c’est aussi acquérir une intelligence du geste »

Pour expliquer l’évolution de l’espèce humaine, assure le psychologue François Osiurak, il ne suffit pas de dire que les individus se sont copiés les uns les autres sans rien comprendre à ce qu’ils faisaient. Leurs dispositions cognitives ont nécessairement joué un rôle.

Cette interview est parue sur Cortex Mag, site du LabEx Cortex, dédié aux fondements biologiques de la cognition.

Pourquoi l’espèce humaine est-elle la seule à avoir développé une culture technologique aussi poussée ? Et comment est-elle parvenue à transmettre ces connaissances au fil des générations ? Ces questions, à la croisée de l’anthropologie, des sciences cognitives et de la philosophie, taraudent les chercheurs depuis longtemps. L’hypothèse la plus répandue pour y répondre est que cette évolution a été rendue possible par les capacités d’imitation de l’être humain. Reproduire fidèlement un geste technique même sans comprendre les principes qui le sous-tendent suffirait à en assurer la transmission. Même s’il lui reconnaît des mérites, François Osiurak, spécialiste de psychologie et de sciences cognitives, ne la trouve pas satisfaisante, comme il l’expliquait déjà à Cortex Mag en 2016. Pour lui, il ne peut y avoir d’apprentissage sans une intelligence du geste. Ses derniers travaux renforcent cette hypothèse.

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« Avatar met en scène deux formes d’écologie radicalement différentes »

Alors que la suite du blockbuster de James Cameron sort sur les écrans le 14 décembre, nous avons proposé à l’anthropologue Perig Pitrou d’analyser le premier opus. Par-delà nature et culture, quelles représentations du vivant se cachent derrière le message écologique du film ? Cette interview est parue dans le Journal du CNRS.

Grâce à son avatar, la scientifique humaine Grace Augustine (Sigourney Weaver) s’occupe d’enfants Na’vis, ici devant l’école qu’elle a créée avant que les choses ne se gâtent… ©Twentieth Century-Fox Film Corporation – Giant Studios – Lightstorm Entertainment

Le film Avatar et ses fameux Na’vis, extraterrestres à la peau bleue aux prises avec des Terriens avides de conquêtes, proposait en 2009 une fable écologique devenue le plus gros succès en salles de tous les temps. Quelle conception de la vie le film met-il en scène ?

Perig Pitrou (1). La première qualité de ce film est de présenter des singularités tout à la fois biologiques et sociotechniques. D’un côté, on croise sans cesse des formes de vie inconnues – animales, végétales, humanoïdes… – dans un environnement foisonnant. On découvre l’écologie de la planète imaginaire Pandora, notamment l’existence de systèmes de communication entre différentes espèces qui ne ressemblent à rien de ce que l’on connaît sur Terre.

La diversité des formes de vie (dans le film) est un prétexte pour nous plonger dans un univers animiste, radicalement différent des schémas de pensée occidentaux.

D’un autre côté, le film montre ce que cette communication implique d’un point de vue politique et social : les espèces vivent en communion les unes avec les autres, des cavaliers humanoïdes nouent un lien éternel et organique avec leur monture, les arbres parlent aux vivants et même aux morts… La diversité des formes de vie est un prétexte pour nous plonger dans un univers animiste, radicalement différent des schémas de pensée occidentaux. L’arrivée des humains sur cette planète, sous forme de complexe militaro-industriel et prédateur, accentue encore ce contraste. Ils ne comprennent pas ce qu’ils voient et tentent d’imposer leur vision du monde

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La culture, moteur de notre évolution

L’intelligence, le langage, les technologies humaines sont sans équivalents dans le reste du monde animal. Selon Kevin Laland, notre espèce a elle-même créé les conditions de ce développement exceptionnel.

Cette critique est parue dans Sciences Humaines (n°353 – décembre 2022), dans la rubrique « le livre du mois ». À découvrir en kiosque ou en ligne.

La Symphonie inachevée de Darwin, Kevin Laland, La Découverte, 2022, 450 p., 28 €

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Comment définir « la vie » ?

Contrairement à un caillou, une grenouille est qualifiée de vivante. Un être vivant apparaît comme animé par un élan intérieur ou une sorte de pulsion. Mais ce mouvement est-il réellement indispensable pour définir la vie ? J’ai posé cette question et bien d’autres encore à la philosophe Cécilia Bognon-Küss sur Twitch, dans un live consacré au dossier sur la vie que j’ai coordonné Sciences Humaines. Le replay est disponible ici. Bonne lecture !

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Qu’est-ce que la vie ?

Philosophes, biologistes, juristes… Regards croisés

« De la “philosophie de la biologie” ? Mais ça n’existe pas ! » Cette réaction, je l’ai entendue cent fois de la part de proches ou des connaissance quand je leur disais travailler avec des philosophes et des historiens sur les manipulations génétiques. Les champs disciplinaires sont trop souvent considérés comme l’eau et l’huile : sciences humaines et sociales d’un côté, naturelles et formelles de l’autre…

Questions byzantines

Pourtant ces frontières n’auraient pas eu beaucoup de sens pour des pionniers de la biologie et de l’histoire naturelle, comme Darwin, Lamarck ou encore Buffon. Dès l’Antiquité, le philosophe Aristote s’interrogeait sur la nature de la vie et tentait de classifier toutes ses formes – animales, végétales –, sans se soucier de savoir s’il outrepassait sa discipline. Toutes les approches l’intéressaient ! Aujourd’hui encore, expliquer ce qu’est un être vivant revient à se pencher tout à la fois sur son génome, sa biologie moléculaire, son anatomie, son espèce, sa situation dans l’arbre du vivant et dans son environnement… C’est aussi poser des questions byzantines sur la définition de la vie, sur les angles morts et les perspectives offertes par cette notion. C’est retracer l’histoire des recherches sur ce thème et s’intéresser à “l’évolution de l’évolution” par exemple. C’est prendre conscience des enjeux politiques attachés à l’idée de « vie », à l’heure de la crise écologique notamment.

Croiser à nouveau tous ces regards, leur permettre de s’enrichir mutuellement, et ainsi appréhender le vivant de façon panoramique, c’est toute l’ambition de ce dossier. Nous avons sollicité des historiens, des biologistes, des philosophes, des virologues, des juristes ou encore des écologues… Pour vous offrir autant de points de vue que possible sur cette réalité par ailleurs centrale dans nos existences. Car s’il y a bien quelque chose qui nous rassemble toutes et tous, au-delà même de l’espèce humaine, c’est bien le fait d’être en vie.

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L’espèce humaine était-elle attendue ?

Dans Destinées improbables (La Découverte, 2021), Le biologiste Jonathan B. Losos offre une synthèse passionnante des recherches de ces quarante dernières années sur l’évolution des espèces, entre hasard et nécessité. Cette recension est parue dans Sciences Humaines (n°340, octobre 2021).

Dans le film de Frank Capra La vie est belle (1946), un ange propose au héros de vivre une expérience métaphysique : voir ce que serait devenu le monde s’il n’était jamais né. George Bailey se retrouve ainsi à déambuler dans sa ville de Bedford Falls, devenue méconnaissable ; ses proches ont suivi d’autres parcours, certains ont même disparu. À la fin des années 1980, le paléontologue Stephen Jay Gould s’inspire de cette fiction pour poser une question fondamentale en biologie.

Si le monde vivant – végétaux, animaux, micro-organismes… – revenait à son état initial, son évolution suivrait-elle un chemin identique ou emprunterait-elle d’autres voies ?Les mêmes espèces survivraient-elles, ou bien les êtres vivants deviendraient-ils totalement différents de ce que nous connaissons ? S.J. Gould défend la seconde option. Pour lui, la contingence est reine : le fait qu’une espèce survive ou s’éteigne dépend surtout de hasards et d’accidents. On pourrait certes expliquer après coup comment elle a évolué, en quoi sa physiologie était plus ou moins adaptée à l’environnement par exemple. Mais cette évolution n’aurait rien d’un destin inéluctable. L’humanité pourrait ainsi ne jamais avoir existé.

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Notre psychologie, un héritage du passé ?

Notre psychologie actuelle serait-elle le fruit d’une réponse adaptative aux conditions du passé ? Un article récent relance les critiques sur cette théorie explicative. Cet article est paru dans Sciences Humaines (n° 329, octobre 2020)

Pourquoi avons-nous peur des serpents et insectes venimeux, même si nous n’en croisons jamais ? Un amateur de psychologie évolutionniste ou « évopsy » pourrait répondre que cette crainte a aidé nos ancêtres préhistoriques à se protéger de piqûres mortelles et donc à survivre. Elle aurait ainsi été sélectionnée au fil de l’évolution naturelle, comme d’ailleurs un grand nombre des comportements humains : la façon dont on recherche de la nourriture, un partenaire sexuel, un foyer, etc. Ce genre d’explication suscite néanmoins de vifs débats depuis son apparition à la fin des années 1980.

Spéculative et circulaire

Beaucoup de chercheurs en sciences humaines et sociales ont notamment reproché à l’évopsy de négliger le poids des facteurs historiques ou culturels. « Dans les années 1990, illustre le philosophe des sciences Philippe Huneman, codirecteur d’un ouvrage de référence sur Les Mondes darwiniens (2011), les fondateurs de l’évopsy ont prétendu avoir identifié des comportements naturels, communs à toute l’humanité. » Par exemple un ratio entre la taille d’une femme et celles de ses hanches, tel qu’elle serait jugée plus ou moins attirante par les hommes… « Leurs tests étaient complètement biaisés ! Et on a pu facilement montrer que les standards de beauté étaient très différents d’un pays à l’autre. »

La philosophe américaine Subrena Smith vient de jeter un nouveau pavé dans la mare dans un récent article. Elle dénonce l’évopsy comme une idée nécessairement « spéculative » et « circulaire ». Lire la suite

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« L’urgence environnementale est bien plus pressante aujourd’hui »

Selon Serge Morand, écologue et biologiste de l’évolution, les chercheurs en sciences de l’environnement et en écologie sont plus politisés qu’il y a vingt ou trente ans. Les projets alliant la recherche scientifique à l’action politique et impliquant des communautés locales se multiplient à travers le monde. Cette interview est parue dans Le Journal du CNRS.

 

Récolte de l’orge en France. L’agriculture est au centre de nombreux enjeux : sécurité, biodiversité, rapport de l’homme à la nature… © H. Rigel / Biosphoto / Biosphoto via AFP

 

Vous avez publié en 2016 un ouvrage intitulé La prochaine peste. L’épidémie actuelle était-elle prévisible ?

Serge Morand (1) : L’apparition du virus SARS-CoV-2 était une possibilité parmi d’autres. Personne ne pouvait savoir que nous affronterions cette épidémie en particulier, mais toutes les conditions étaient réunies pour qu’une maladie infectieuse émergente de ce type se propage à grande vitesse sur la planète. La mondialisation s’est accélérée : les transports aériens n’ont jamais été aussi nombreux et fréquents – ils ont augmenté de 1 200 % depuis les années 1970 ! Le tourisme international de masse a explosé, y compris dans des pays comme la Chine. Cette accélération de la mondialisation explique que l’épidémie actuelle soit beaucoup plus répandue que celle du SRAS de 2002 par exemple.

Aujourd’hui, un agent pathogène peu virulent passe relativement inaperçu les premiers temps, et peut donc circuler très largement avant que l’on ne prenne conscience de sa gravité. Ça a été d’autant plus vrai, en l’occurrence, que le SARS-CoV-2 est hautement transmissible. Malheureusement, il me semble qu’un certain déni a prévalu depuis une vingtaine d’années. Nous et nos institutions avons du mal à remettre en cause notre manière d’occuper la planète et de circuler. C’est un peu comme une crise économique : on voit bien que la bulle grossit, grossit… Mais on fait semblant de ne pas le savoir. Lire la suite

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L’hétérosexualité est-elle naturelle ?

Observée chez quelques 1500 espèces animales, l’homosexualité reste mystérieuse pour de nombreux spécialistes en biologie de l’évolution. Mais d’après un article publié dans Nature, la question pourrait être mal posée depuis le début. Cet article est paru dans Sciences humaines (n° 323, mars 2020).

Les relations homosexuelles sont extrêmement répandues dans le monde vivant, elles ont notamment été observées chez quelque 1 500 espèces animales. Or ce constat est depuis longtemps une source d’interrogations pour les biologistes. En principe, dans le temps long de l’évolution naturelle, seuls les comportements maximisant les chances de se reproduire et de transmettre ses gènes sont sélectionnés. Comment, dans ce cadre darwinien, expliquer l’apparition et la conservation de pratiques stériles ?

Pansexualité primordiale

Selon un article publié dans Nature, cette question pourrait tout simplement être mal posée : on part du principe que l’hétérosexualité serait la norme, la condition par défaut des êtres vivants, et qu’une partie aurait ensuite dérivé vers l’homosexualité. On peut pourtant imaginer l’inverse ! Lire la suite

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