Alors que neuf hommes ont été condamnés, des politiques s’affrontent sur la dimension « culturelle » de leur crime.
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Devant le tribunal de Liverpool © Christopher Furlong / AFP
Un fait divers tragique ravive le débat sur l’intégration des musulmans dans la société britannique. Mercredi 9 mai, le tribunal de Liverpool a condamné neuf hommes, d’origine pakistanaise et afghane, pour avoir attiré, séquestré et violé près d’une cinquantaine adolescentes, âgées de 12 à 16 ans.
L’histoire en serait restée là si Mohammed Shafiq, directeur exécutif de la fondation Ramadan, n’avait jeté un pavé dans la mare. Il affirme que cette affaire « illustre un problème important concernant la communauté britannique pakistanaise, au sein de laquelle des hommes pensent que les adolescentes blanches ne valent rien et peuvent être agressées ».
Dès le lendemain, David Aaronovitch, écrivain et éditorialiste au journal The Times, renchérit en publiant une chronique intitulée : « Soyons honnêtes, il y a un lien direct avec l’islam ». « Prenez l’idée qu’on se fait d’une bonne et d’une mauvaise femme, écrit-il. Selon beaucoup de préceptes islamiques (et parfois juifs), une femme pudique garde les yeux baissés, couvre ses cheveux et son visage ; sa voix est calme, elle ne parle jamais aux célibataires. Du coup, celle qui regarde où elle veut, dont les cheveux volent au vent, qui fait entendre sa voix et parle à qui elle veut passe pour impudique. Un pas de plus, et l’on considère qu’elle ‘ne cherche que ça’. »
Le procureur en chef de la couronne pour le Nord-Ouest du pays, Nazir Afzal, estime lui-même que le « bagage culturel » des condamnés a joué un rôle, rapporte le journal Daily mail. « Certaines communautés croient qu’il y a un droit à l’auto-détermination pour les hommes, mais pas pour les femmes. Elles sont considérées comme des êtres inférieurs. » Il demande cependant que le débat ne se focalise pas sur ce point. « La plupart de ces hommes étaient chauffeurs de taxis, ironise-t-il, mais personne n’en tire des conclusions pour la communauté des chauffeurs de taxis. »
La police a affirmé que les motivations des agresseurs n’étaient pas de nature « raciale », mais le ministre de l’enfance Tim Lougton est revenu à la charge. Mercredi 16 mai, il a affirmé que « la Grande-Bretagne a besoin d’un débat ouvert sur des questions culturelles qui pourraient expliquer pourquoi les hommes d’origine pakistanaise sont surreprésentés parmi les délinquants sexuels poursuivis pour avoir abusé de jeunes filles blanches. » Selon le journal The Times, 631 jeunes filles auraient été séquestrées et violées ces cinq dernières années en Angleterre. D’autres crimes sexuels, comme la prédation sur Internet ou les abus au sein de la famille, seraient essentiellement le fait « d’hommes blancs » (les statistiques ethniques sont autorisées en Angleterre).
Le débat est d’autant plus tendu que des accusations ont été rapportées dès 2008, en vain, rapporte le site d’information de la BBC. Ce n’est qu’en 2011, avec l’arrivée d’un nouveau chef de police, que les investigations ont mis un terme aux abus. Selon l’ex-député travailliste Ann Cryer, les représentant de l’autorité ont d’abord ignoré les accusations parce qu’ils étaient « terrifiés à l’idée de passer pour racistes ». Les officiers de police concernés n’ont pas confirmé. Une enquête interne est en cours pour déterminer les responsabilités.