La découverte du boson de Higgs, appelé aussi « particule de Dieu », devrait éclairer les scientifiques sur l’origine de l’univers. Mais les réponses ne sont pas sans poser de nouvelles questions…
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C’est la trouvaille scientifique qui devait éclipser Dieu. Le physicien Étienne Klein avait même décelé un anagramme en guise de prédiction : « l’accélérateur de particules » — qui aura permis cette découverte — « éclipsera l’éclat du créateur »… Pour la première fois, le Centre européen de recherche nucléaire (Cern) annonce officiellement avoir observé la « particule de Dieu ». Elle doit ce surnom à Léon Lederman, prix Nobel de physique en 1988. Il est l’auteur d’un livre de vulgarisation scientifique, publié en 1993 : The God particle : if the Universe is the Answer, What is the Question ? — « si l’univers est la réponse, quelle est la question ? » En France, le titre est plus modéré, les traducteurs évoquent Une sacrée particule (éd. Odile Jacob). Un titre plus proche de l’intention de Léon Lederman, qui fait un jeu de mots anglais entre « God particle » et « Goddamn particle » — une « fichue particule », difficile à trouver. « L’éditeur ne nous laisserait pas l’appeler comme ça », plaisante-t-il en préface de son ouvrage.
Jeu de mots au départ, le surnom s’est imposé. « Cela peut en gêner certains », renchérit le physicien Peter Higgs, figure de proue de la particule qui vient d’être découverte : le fameux « boson de Higgs ». Cette trouvaille a pourtant bien des implications métaphysiques voire théologiques. « À l’heure actuelle, explique le scientifique Yves Sirois au magazine L’Express, nous savons que l’univers est constitué de matière, nous savons de quoi est faite cette matière, mais nous ne savons pas comment elle s’est formée. Nous sommes sur le point de découvrir l’origine de la matière. » Le boson de Higgs serait apparu juste après le big-bang — instant de la création du monde que les scientifiques n’arrivent pas à expliquer.
Pour vulgariser, certains physiciens décrivent les bosons de Higgs comme une sorte de « ciment », une colle pour toutes les « briques » de l’univers : « c’est la masse primordiale, détaille le physicien Michel Davier sur CanalAcademie.com, la masse des particules qui constituent toutes les autres particules que nous connaissons ». Concrètement, les plus petits éléments qui composent l’univers, les quarks, n’ont pas de masse à l’origine. Quand ils se déplacent, on suppose qu’ils traversent un « champ de Higgs », omniprésent, qu’on peut assimiler à un champ de neige dont les bosons seraient les flocons. Les quarks se couvrent de bosons comme on se couvrirait de neige. Ils acquièrent ainsi une masse et peuvent se lier pour former de nouvelles particules. Celles-ci, à terme, donneront de la matière.
Depuis les années 60, cette théorie n’était pas confirmée par l’expérience. La semaine dernière, les physiciens du Cern ont annoncé avoir observé une particule qui se comporte comme ils l’attendraient du boson de Higgs et qui a plus de 99 % de chances d’en être un. Néanmoins, cette découverte « pose autant de questions qu’elle apporte de réponses, précise le bulletin du Cern. Par exemple, qu’est-ce qui détermine la masse du boson du Higgs » ? On serait tenté de reformuler : quelle est l’origine de l’origine ? Tant que les scientifiques ne seront pas remontés au big-bang lui-même voire à ce qui l’aurait précédé, il est à parier que les religions se satisferont de leurs propres explications sur la création de l’univers.
À lire : « La chasse au bison de Higgs« , une BD ludique et pédagogique sur le site de LHC France.